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Nicolas Jolivot
7 mai 2020

VOYAGES DANS MON JARDIN (10)

gasteropodes

 

4 mai

Les escargots m'ont toujours fasciné. Enfant, j'organisais des courses de ces bêtes à cornes par phases éliminatoires, en leur collant de minuscules dossards en papier sur la coquille, pour décerner, après demi finale et finale, la médaille d'or olympique à la plus rapide d'entre elles. A l'adolescence, j'ai souvent commencé des élevages d'escargots destinés à la vente pour les habitants du quartier. Je n'en ai pas vendu un seul, et l'abandon rapide de mon activité fort peu lucrative favorisait l'échappée de plusieurs centaines de gastéropodes d'un seul coup avec les conséquences ravageuses et heureusement momentanées qu'on peut imaginer sur le potager. Depuis, je me contente de les manger. Je serai certainement le dernier à ramasser les escargots de mon jardin, à les faire jeûner tout en les alimentant d'une patouille de farine et de vin rouge, à les faire baver sous du gros sel, à les ébouillanter dans un court-bouillon parfumé, à les reloger dans leur coquille et à boucher le tout avec un beurre persillé.

Les jeunes gens, quand je raconte cela, font une mine dégoûtée, tout en s'étonnant qu'il puisse y avoir encore des survivances de pratiques moyenâgeuses dans leur entourage. Je pensais exactement comme eux quand mon grand-père, après avoir soigneusement élevé ses lapins, en attrapait un par les oreilles le samedi matin, le suspendait par les pattes, lui faisait la peau, laissait goutter le sang et le découpait dans le plat après cuisson le lendemain au milieu des petits pois.

Pour l'heure, il n'est point question de ramassage, car la période est à la reproduction et le bord de la coquille, le péristome, n'est pas encore solidifié. Il me faudra attendre juillet-août.

Escargots Juvéniles / Escargot Petit-gris (Helix aspersa aspersa) qu'on appelle aussi luma dans ma région. / Escargot des jardins (Cepaea hortensis) : je ne vois plus ces mêmes escargots jaunes quand ils sont cerclés de lignes de couleur sombre. Bryone dioïque (Bryoniadioica) : Navet du diable. Cette plante grimpante sauvage avait inventé depuis longtemps le cordon téléphonique ! Elle croît à une vitesse vertigineuse, de cinq à dix centimètres par jour. Ronce commune (Rubus fructicosus) : La fleur. / Reproduction des escargots Petits-gris. / Accumulation importante de chenilles Piéride du chou sur une tige de pastel des teinturiers.

 

jgp

 

 

Les plus vieux souvenirs que j’ai de ce grand-père datent du tout début des années soixante-dix. Il avait une cinquantaine d’années. Il portait toujours un béret que je m’amusais à lui chiper pendant qu’il s’endormait le soir devant la télé. Je me souviens de la forte odeur de cuir chevelu mêlée à celle du tabac gris sur cette rondelle de feutre. Je n’ai aucun souvenir de lui sans son bleu de travail. Soit il jardinait, soit il bricolait. Jamais je ne l’ai vu faire autre chose. Taiseux, il ne sortait jamais, ne recevait pas plus, il avait très peu d’amis. Longtemps je n’ai pas pu imaginer qu’il fût jeune. Il était évident qu’il avait toujours existé avec la même tête, avec ses mêmes grosses mains noueuses tachées et veinulées. Jusqu’au jour où j’ai trouvé une photographie de lui, jeune, datant de 1936, habillé en joueur de football et posant dans le jardin. Quoi ! mon grand-père jouait au foot ? Il portait déjà une calotte sur le crâne ! Il fut donc un temps où il avait la cuisse claire sous un short et jouait avec une équipe de jeunes de son âge ! Invraisemblable !

 

Sur ce dessin, réalisé à partir d'une photographie de 1936, on peut voir que l'ancien bassin, au premier plan, a été comblé pour en faire un parterre de fleurs (dont des lychnis), que l'allée centrale est bordées de bouillées de fusain récemment plantées, et qu'elle est surmontée d'un arceau et d'une boule miroir qui resteront en place jusque dans les années soixante. Sportif et bricoleur précoce, le grand-père avait fabriqué un portique pour pratiquer les anneaux (en arrière plan). Au fond de l'allée, le poulailler. Sur le tronc d'arbre débité qui sert de socle, un protège pot en fonte porte un géranium. Ce protège pot est toujours dans le jardin et accueille maintenant de l'orpin. Le pot en terre cuite sur son socle, page de gauche, est aussi l'un des rares éléments qui sont restés dans le jardin depuis les années trente.

 

 

 

 

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