Les carnets de Nicolas sont des carnets d’ «

Les carnets de Nicolas sont des carnets d’ « adresse », en somme, où le voyageur, tout en savourant une glace aux petits pois, peint (ou croque) une invasion de libellules, mais où – et c’est là peut-être le double fond que recèle cette valise rouge – un regard « prend le temps » de se poser avec attention et amour sur le monde prochain et lointain qui l’entoure  dans les infinis nuancements de ses dégradés, dans le jeu de ses contrastes, dans les pleins et les déliés de ses traits de plume, dans les boucles et les ondes de son pinceau, dans la scansion de ses mises en page. 

Au vrai, Nicolas Jolivot sait ressusciter l’infinie beauté de notre monde sur la finitude du papier le plus pauvre. Comme si avec ce strict minimum, ces seuls « moyens de transport »  – deux pinceaux, un peu de papier chiné sur place, du brou de noix, un flacon d’encre de Chine, de la gouache blanche, quelques feutres et des plumes – comme si Nicolas nous apprenait, dans son ascèse heureuse, qu’au bout du « compte » (ou du « conte ») de nos vies, les moyens du bord étaient nos seuls vrais moyens de « fortune », prenant leçon sur ces bandes d’enfants berbères qui, avec leur moulin d’infortune – deux baguettes croisées et des bouts de carton – s’amusent tout l’après-midi à courir avec et à les faire tourner au vent, faisant ainsi du rien le tout.

                                                                        8 juin 2011

                                                                       Yves Leclair